mercredi 21 décembre 2011

Boucheron, parfum bijou



Vous entendez ce bruit de verres qui tintent ? Ce sont les iFrags anorexiques qui tremblent sur leurs rayons en exhalant de petites bouffées asthmatiques d’iso E super. Dans le sillage d’un nouveau contrat de licence chez Interparfums (qui fabrique également Van Cleef & Arpels), Boucheron relance son eau de parfum éponyme, créée en 1988, histoire de démontrer que la grande dame est toujours d’actualité.
Je n’ai pas porté Boucheron à l’époque ; je suis donc incapable d’évaluer quelles opérations il a dû subir entretemps pour se conformer aux réglementations. Mais même en l’état, ce parfum est suffisamment beau et diffusif pour attirer les compliments au moment de la bise…

Bien qu’il ait été lancé douze ans après First de Van Cleef & Arpels, premier parfum de joaillier et sans doute le dernier floral aldéhydé qui n'ait pas été pensé au second degré, Boucheron appartient encore, comme son prédécesseur, à l’ère classique de la parfumerie. Et comme Bal à Versailles qui était déjà aussi, en 1962, une fragrance décrochée de son époque, Boucheron charrie l’ADN des grands orientaux floraux nés avec L’Origan de Coty.
Ce parti-pris de classicisme était délibéré : dans le Parfums de Légende de Michael Edwards, le président des parfums Boucheron, Jean-Claude Le Rouzic, explique qu’il voulait à tout prix éviter le style « agressif » des blockbusters des années 80, Poison et Giorgio.

Dans son Journal d’un Parfumeur, Jean-Claude Ellena raconte que pour First, il avait « collecté, emprunté et entassé tous les signes de féminité, de richesse, de pouvoir ». Francis Deléamont et Jean-Pierre Béthouart de chez Firmenich ont manifestement adopté une démarche similaire, en glaçant d’un vernis perlé, endiamanté, la douceur miellée (genêt, narcisse), capiteuse (fleur d’oranger, jasmin) et baumée (fève tonka, vanille) du cœur. Ces deux effets – notes froides et scintillantes en tête, opulence du cœur floral oriental – traduisent à la fois l’idée du luxe et la sensation d’un bijou, dur et froid dans son écrin, s’éveillant à la tiédeur de la peau…

Parce qu’elle se réfère délibérément au patrimoine de la parfumerie, la fragrance dégage la même sensation intemporelle qu’un bijou de chez Boucheron, transmis d’une génération à l’autre. Elle a l’autorité naturelle d’une descendante de longue lignée, mais curieusement, malgré son allure hautaine, elle est étonnamment facile à porter. Comme le disait en son temps Elizabeth Taylor, les diamants, ça va avec tout…


Photo: Odalisque de Horst P. Horst

6 commentaires:

  1. Il est très beau, mais ressenti récemment dans son nouveau flacon, je trouve qu'il a quand même été sacrément "lifté", ne serait-ce que par rapport à ce qu'il était deux ans auparavant....

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  2. Boucheron (edp) mon number one depuis plusieurs mois, gros gros gros coup de coeur !! (mais comment ai-je pu le bouder tant d'années ??)

    Reformulation dans l'air ? :(((

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  3. Sophie, dorénavant je prends pour acquis que pratiquement tout change tous les deux ans. Mis à part certains chefs d'oeuvre en péril, j'ai décidé que j'étais lasse de regretter ce qui a été et n'est plus...

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  4. Lamarr, je ne savais pas! Je suis ravie que nous nous retrouvions là-dessus...

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  5. La note de tête "basilic", originale et dérangeante à la fois existe-t-elle toujours ? Il faudrait que j'aille le tester.Je pense qu'il a dû rester de toute façon beaucoup plus oriental que "First", floral aldéhydé très jasmin que j'adore.

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  6. Zab, la note de tête basilic ne m'a pas frappée... sans doute est-elle tombée sous les balles de l'IFRA, mais je n'ai pas l'échantillon ici avec moi pour re-sentir. En tous cas, en effet, c'est beaucoup plus oriental que First et pour moi, plus portable.

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