vendredi 25 septembre 2009

La Collection Extraordinaire de Van Cleef & Arpels, à commencer par Gardénia Pétale



J’ignore qui a assuré la direction artistique de la nouvelle Collection Extraordinaire de Van Cleef & Arpels, mais je le (ou la) félicite pour la justesse du concept et de sa réalisation. La grâce désinvolte de ces cinq soliflores (plus une eau de Cologne) correspond parfaitement à la fantaisie des jardins de pierreries du joaillier parisien. Et bien que la déclinaison de « soli-notes » représente désormais un passage obligé des lignes de parfums exclusives dans les maisons de prestige, la Collection Extraordinaire n’a, à ce jour, recueilli que des éloges dans les grands blogs de langue anglaise *, dont les auteurs ont pourtant de quoi être blasés.

Rien de révolutionnaire pourtant (les babioles précieuses de VC &A ne sont pas, non plus, particulièrement d’avant-garde), mais une qualité impeccable dans l’interprétation de thèmes classiques, assez rafraîchis pour ne jamais susciter de sensation de « déjà-senti ». La démonstratrice des Galeries Lafayette, qui les découvrait le jour où je suis passée au stand, m’a aussitôt fait remarquer que le fait de donner aux parfums des noms de fleurs était une décision judicieuse : « Les gens aiment bien reconnaître ce qu’ils sentent. »

Et c’est peut-être cette absence de prétention, d’ostentation, de prouesses de parfumeurs, qui confère cette impression de fraîcheur à la Collection Extraordinaire, et qui la rend aussi attachante : il s’agit, manifestement, d’un parti-pris esthétique. Donc d’une véritable direction artistique (les six parfumeurs-auteurs viennent de deux laboratoires différents, Givaudan et Symrise : c’est donc bien de VC & A que relève cette orientation). Je me demande aussi si le choix des thèmes – mis à part l’iris et l’eau de Cologne --, s’est porté délibérément sur des fleurs dont on ne peut extraire l’essence. Le lys, le muguet, l’orchidée, le gardénia sont forcément des interprétations de parfumeurs – des matériaux habilement sertis. De nouveau, cela reflète une véritable cohérence avec le monde de la joaillerie.

Je porte le Gardénia Pétale de Nathalie Feisthauer depuis une dizaine de jours maintenant et en toute occasion – au travail, lors d’un mariage ou pour boire une flûte de champagne au bar du Plaza avec Monsieur – et j’avoue qu’aucun de mes parfums n’a recueilli plus de compliments spontanés. Peut-être, comme disait la jeune démonstratrice de VC & A, parce qu’il s’agit d’une odeur assez aisément lisible : ça sent bon la fleur. Mais surtout, sans doute, à cause du volume de l’odeur.

Bien qu’il ne pèse pas plus sur la peau qu’une écharpe en soie, à tel point que je l’oublie parfois, ce parfum déploie un sillage à la fois gigantesque et très doux. Il est beaucoup plus facile à porter que mon autre gardénia, la mangeuse d’homme siliconée de Tom Ford ; aucune femme fatale n’est tapie derrière le buisson.

Mais bien qu’il s’agisse d’une interprétation très botaniquement correcte du gardénia, de la fraîcheur verte du bouton de fleur au léger relent de champignon de la corolle au moment où elle commence à se flétrir, Gardénia Pétale est aussi un hybride, une espèce d’OGM. La part la plus légère de l’odeur du lys – verte, légèrement épicée – a été greffée sur les pétales crémeux ; le lys aimante, par ses facettes solaires (c’est-à-dire salicylées), ses sœurs tropicales, la fleur de frangipanier, l’ylang-ylang et la vanille. Dans sa lecture du parfum, Octavian Coifan de 1000fragrances évoque « la richesse de Songes (Goutal) cachée derrière Un Matin d’Orage (Goutal) ». Mais le parfum ne présente ni l’ouverture ozonique crépitante du second, ni l’abandon érotique du premier. Avec son sillage discrètement affirmé, Gardénia Pétale affiche la sensualité tranquille d’une femme qui n’a jamais besoin de hausser le ton pour se faire entendre. Et qui vous attire dans son sillage, sans avoir l’air d’y toucher.

Je reviendrai à nouveau sur la Collection Extraordinaire la semaine prochaine.


* Cliquez ici pour 1000fragrances, ici pour Now Smell This et ici pour The Perfume Posse.


Image: Photo de Francesca Woodman.



14 commentaires:

  1. Par rapport au gardenia tubereuse d'Estee Lauder, est-il meilleur?

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  2. 40/20: Différent. Notamment parce que la tubéreuse, si elle apparaît dans Gardénia Pétale, reste extrêmement discrète. Mais en revanche, les fleurs salicylées sont présentes (ylang, frangipanier) ce qui n'est pas le cas dans le Lauder. C'est vraiment plutôt un gardénia-lys.

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  3. "...pour boire une flûte de champagne au bar du Plaza avec Monsieur"... hummm, y aurait-il une nouvelle aventure en perspective? ;-) Je l'espere!

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  4. Je ne connais pas l'odeur du gardénia au naturel, je n'ai donc aucun avis sur le caractère "réaliste" du rendu. Ce qui me semble intéressant dans ce parfum c'est la fusion parfaite des étapes qui nous font passer d'un stade lumineux fusant (le côté vert du lys, du muguet...) à un fond solaire (de fin de journée) dont la parenté avec Songes me semble tellement évidente... Toi qui portes ce dernier, le trouves-tu vraiment plus lascif, plus matière, plus... ?

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  5. Thierry, j'ai justement enchaîné Gardénia Pétale l'après-midi et Songes en soirée pour un mariage la semaine dernière. Des deux, Songes est très nettement le plus lascif, justement à cause de cette ouverture verte et fusante que tu soulignes chez Gardénia Pétales. Ce dernier mène du matin au coucher de soleil; Songes fait entrer dans la nuit. Tous deux sont assez différents pour justifier qu'on possède l'un et l'autre. Ce qui est désormais mon cas.

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  6. et ma chere denyse, j'ai eu ce weekend un vrai coup de coeur pour la collection extraordinaire, un pur coup de foudre pour gardenia petale
    cette odeur de fleur blanche capiteuse mais singulierement fraiche et tendre avec cette impression de tige coupée plongee dans un vase, une entiere reussite

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  7. Vero! Génial! Je suis ravie qu'on soit raccord... D'autres coups de coeur?

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  8. hummm back to black a revoir, car le coeur est un coeur de "louve" assez amandé, il a des facette du lutens sans la cerise, mais le fond tabacé qui apparait est tres agreable
    sinon rien de special, pas de craquage sur les kurdijan , par contre fourreau noir est beaucoup plus beau sur ma peau que les concretes reçues du palais royal
    mais je retourne au salon du parfum a paris samedi
    et oui, je n'ai pas resisté ;)
    donc je pense prendre plus le temps pour etudier tout ça
    encore merci pour ton blog, pour moi, c'est une mine d'or et ça me permet aussi de faire le tri dans ce qui sort et j'evite donc de me disperser

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  9. Vero, j'en suis ravie. Moi aussi, en fin de compte, j'attends pour Back to Black (c'est d'ailleurs obligatoire, le budget ne suit pas). Fourreau Noir n'est pas pour moi, c'est toujours ça...

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  10. En fait moi non plus je ne connais pas l'odeur du gardenia naturel, d'ailleurs je suis zero en botanique, par contre mes references en parfumerie sont Kai et la tubereuse de gardenia par Estee Lauder (PC Tuberose Gardenia), deux senteurs que j'aime beaucoup pour leur fraicheur blanche intense. J'ai trouve Gardenia Petale tres bien execute mais c'est son cote "suave" que je n'aime pas, sans doute trop acquatique vert. Je prefere le muguet au gardenia, il est adorable et feminin. Je sens que je vais le mettre sur ma liste officielle cadeau pour Noel ou mon anniversaire...

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  11. Cougar, ma référence gardénia à moi, c'est le Tom Ford et justement, le VC&A est très différent par sa fraîcheur... J'aime beaucoup le muguet aussi, j'y reviendrai.

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  12. j'avoue, j'ai craqué sur back to black samedi, les facettes y etaient tres differentes de mon derniers essais, ce tabac amandé et miellé est une petite merveille, il evolue en tabac plus masculin , plus sec, le miel disparait
    j'ai eu le plaisir de rencontrer vero kern au salon avec ses petites merveilles, ainsi que marc antoine cortichiatto pour parfum d'empire, tout 2 adorables, et abordables

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  13. Vero, oui, elle m'a dit! On s'est ratées au salon malheureusement...

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