Diptyque est l’un des
grands pionniers du niche avec L’Artisan Parfumeur – la maison a d’ailleurs été
fondée avant, dans les années 1960. Ses innovations ont fait époque, non
seulement parce que Diptyque a intégré pour la première fois parfumerie
alcoolique et parfumerie d’ambiance au sein d’une même maison, mais aussi parce
que les histoires des parfums à porter n’est pas inspirée par des archétypes
masculins ou féminins, mais par les souvenirs et expériences des fondateurs de
la marque. Des lieux ou des époques, plutôt que l’univers de la mode
parisienne. Ainsi, L’Ombre dans l’eau
surgit d’une idée de Dido Merwin, créatrice anglaise des pots-pourris de la
maison, après la cueillette de cassis pour ses confitures et de roses pour ses
bouquets. Philosykos fait écho à un été passé sur une île grecque par les
co-fondateurs de la maison, Desmond Knox-Leet et Yves Coueslant. Les souvenirs
d’enfance de ce dernier, qui a grandi en Indochine, inspirent Do Son.
Bien que le trio
fondateur ait déjà depuis quelques années vendu Diptyque, la marque a puisé à
nouveau dans les récits laissés par eux en héritage avec Volutes, inspiré par
les souvenirs de traversée de Marseille à Saïgon d’Yves Coueslant, et plus
précisément par les cigarettes égyptiennes fumées par les élégantes passagères.
Fabrice Pellegrin de Firmenich, collaborateur fréquent de Diptyque (Do Son, Eau
de Lierre, Eau Duelle; Eau Rose…) et auteur de Volutes, explique que l’idée du
parfum, née il y a une dizaine d’années, a été remise en avant d’une part parce
que la marque n’avait pas de parfum oriental, d’autre part parce que le tabac,
note assez rare en parfumerie, paraissait digne d’être exploré.
On peut aussi
penser que ce retour aux origines n’est pas mal venu à une époque où les
marques de parfum s’efforcent de se forger des récits fondateurs pour assoir
leur légitimité : celle de Diptyque, maison réellement historique, n’est
pas à démontrer. L’aura nostalgique d’un parfum faisant référence à ce grand
interdit, le tabac, et aux voyages au long cours en paquebot, semble aussi
hanter l’air du temps en ce moment (Speakeasy de Frapin, Boutonnière d’Arquiste,
etc…). Avec Yves Coueslant, aujourd’hui octogénaire, Diptyque dispose d’un
authentique témoin de l’époque… Il s’est d’ailleurs retrouvé dans Volutes,
confie Fabrice Pellegrin.
Deux types de tabac
entrent dans l’accord : un Nature Print (capture « headspace »)
de cigarettes égyptiennes construit autour d’une absolue de tabac que le
parfumeur décrit comme « plus noire, amère, âcre, fumée, presque cuirée »
et un accord Amsterdamer « plus
miellé, fruits secs, floral et doux ». Parce que le tabac est une odeur
très masculine et que les parfums Diptyque sont toujours à partager, Fabrice
Pellegrin a introduit une note qui n’est pas présente dans le récit initial, l’iris,
pour « casser le côté dur et amener une onctuosité ».
Comme désormais Do Son, Philosykos
et L’Ombre dans l’eau, Volutes est proposé en eau de toilette et eau de parfum :
ce ne sont pas uniquement les concentrations qui changent (en l’occurrence 10
et 16%) mais les formules qui varient légèrement. À vrai dire, je ne perçois
pas de différence radicale entre les deux versions de Volutes, bien que l’eau
de parfum présente des notes iris, épices, styrax, baumes, immortelle et musc
plus prononcées. L’eau de toilette est un peu plus lumineuse et forcément plus
légère : l’iris crée un effet un peu plus « voile de poudre »,
alors que dans l’eau de parfum, le côté presque gras du tabac miellé ressort
plus fortement. L’iris n’est ni racinaire, ni métallique : un cocktail de
cinq muscs différents le plonge dans l’accord tabacé, tandis que la facette
daim de l’iris et celle plus cuirée du tabac introduisent un fond plus
goudronné (edp).
Ni l’une ni l’autre des
versions ne produit un volume spectaculaire – mais je ne m’avancerai pas trop
là-dessus car j’ai remarqué que j’avais du mal à sentir certains parfums à l’iris,
par exemple L’Heure Promise de Cartier, au bout d’un petit moment alors qu’ils
sont perceptibles sur moi. Mais j’ai eu le coup de foudre pour Volutes dès que
je l’ai respiré : l’équilibre entre les deux accords est absolument
exquis. Sa sensualité feutrée sonne juste.
Voilà le genre de parfum qu’on choisit sans trop réfléchir, non parce qu’il s’agit
d’un sent-bon tout bête – il est beaucoup plus sophistiqué que ça – mais parce
que son aura élégante, sans sexe et sans âge, nimbe le corps en douceur.
Volutes sera disponible
en octobre. Entretemps, puisque j’ai fait un tirage au sort d’un échantillon en
avant-première lors de mon dernier billet, voici la gagnante :
Jack Sullivan
Merci de me contacter à
graindemusc arobase gmail point com pour me donner votre adresse.
Illustration réalisée pour Volutes, fournie par Diptyque.
Quelle belle surprise, merci!
RépondreSupprimerVotre article m'a donné une furieuse envie de l'essayer en tout cas, en voici l'occasion.
Je suis ravie que Diptyque propose de plus en plus d'eaux de parfums, la tenue limitée des eaux de toilettes m'a toujours laissée un peu frustrée.
Bonjour Denyse,
RépondreSupprimerJ'ai pu me procurer un échantillon de Volute au corner Diptyque du Printemps où il est présenté en avant première. j'ai trouvé l'eau de parfum un peu plus épicée ? J'ai bien peur de m'avancer (mon nez d'amateur pas bien éclairé...) L'Eau de Toilette m'a davantage charmée.
La tenue et le sillage m'ont paru tous deux discrètes. Mais il est magnifique. Un dernier détail : il n'y avait pas d'orientaux chez Diptyque, certes, mais n'était-ce pas à dessein ?
hélène
ooops, discrets.
RépondreSupprimerSorry
Ça me semble prometteur, bien que comme Jack j'ai souvent été déçue par le sillage et la rémanence des parfums Diptyque. Mais j'adore les odeurs du tabac et de l'iris donc je ferai certainement un effort de le sentir, surtout puisq'il t'a plu autant.
RépondreSupprimer"Exquis"
RépondreSupprimerVoilà comment résumer Volutes en un seul mot !
Certes, certain le trouveront trops sucré, trop miellé, trop ci ou trop ça, mais après Eau Rose l'insipide, le 34 brouillon et dissonant, l'Eau Mage inutile et pas très Diptyque, on retrouve ENFIN la personnalité de la maison dans cette création !
J'ai vraiment tout de suite adhéré dès le premier essai, et j'ai trouvé qu'il s'intègre à merveille dans le reste de la gamme.
L'iris, dans les premiers instant, me fait penser à celui utilisé dans Infusion d'Iris !
Quant aux concentrations, je lui ai préféré l'eau de parfum, qui permet à la formule de s'affirmer, de montrer toute son opulence et sa richesse.
Patrice
Jack Sullivan, ravie de faire plaisir! Comme je le dis dans des réponses aux commentaires de l'autre billet, je suis particulièrement impressionnée par l'edp de L'Ombre dans l'eau, je n'ai pas encore pu essayer celle de Do Son qui semble-t-il est plus fleurs blanches narcotiques...
RépondreSupprimerHélène, l'edp de Volutes est en effet plus épicée (et plus plein de trucs), et je suis assez d'accord sur le sillage assez modéré. Quant aux intentions de la maison sur les orientaux, on ne m'en a pas parlé!
RépondreSupprimerTara, je pense vraiment que Volutes pourrait t'intéresser, même s'il n'a pas forcément le punch que tu aimes dans les parfums...
RépondreSupprimerPatrice, on est d'accord, Volutes est une réussite. Je n'ai pas encore vraiment tranché entre les deux versions, que je porte l'une et l'autre avec énormément de plaisir. Je ne suis pas gênée par le sucré-miellé, au contraire, je trouve que cet aspect est joué avec une grande finesse. Certains y sont hypersensibles, c'est vrai, et rejetteront systématiquement tout parfum présentant ces notes. Peut pas plaire à tout le monde!
RépondreSupprimer@hélène: je vais peut-être dire une bêtise, mais Tam Dao n'est-il pas un oriental?
RépondreSupprimerJack Sullivan, Diptyque présente Tam Dao comme un boisé, mais Michael Edwards de Fragrances of the World, la classification annuelle des parfums, le range dans les orientaux boisés, tout comme Osmoz. Et en effet, son fond baumé lui donne un aspect oriental.
RépondreSupprimerMea culpa, c'est moi qui ai repris le discours de Diptyque sur cette question sans réfléchir!
Denyse, j'adore ce parfum qui symbolise la renaissance de Dyptique (le côté Volute, fumé et tout, c'est le symbole du Phénix qui renait de ses cendres). Bon, après il est pas du tout dans le registre de parfum que j'aime porter (trop "boule", et pis je suis pas très orientaux de chaudasses au final).
RépondreSupprimerCela dit, vous lui trouvez pas des filiations avec certains Olivier Polge ? Dior Homme parait évident, mais plus que DH, je retrouve pas mal du caractère du splendide Midnight In Paris !
Une belle renaissance pour Dytpique !
Jicky
Jicky, je n'aurais pas songé spontanément à ces deux parfums d'Olivier Polge dont la texture me semble beaucoup plus "tulle" que Volutes, qui a quelque chose de gras (au bon sens du terme). Mais je suis d'accord, c'est un très beau lancement pour une marque qu'on a très envie d'aimer encore longtemps.
RépondreSupprimerHistoire de rajouter une référence, j'ai eu des flask backs de Musc Ravageur, même si le sillage de ce dernier est beaucoup beaucoup moins discret.
RépondreSupprimerHélène
Comme je ne pourrais pas le découvrir avant ce week end, ne serait il pas entre Félanilla et Tonka Impériale ? Merci
RépondreSupprimerCes Volutes de tabac et iris mêlés sont évidemment d'une force de séduction redoutable... Un peu dommage cependant s'il manque à ce philtre puissance, tenue et durée. C'est toujours une déception quand un parfum s'évapore trop vite de nos peau, et d'autant plus forte la déception que le parfum est addictif, envoûtant.
RépondreSupprimerEt j'ajouterais une remarque sur ce nom, Volutes, évocateur bien sûr de fumée. J'imagine pourtant que le parfum est plus proche de l'odeur du tabac non fumé, celui qu'on sent le nez sur le paquet de cigarettes et encore plus dans les blagues de tabac à pipe.
Alizarine... bien chipoteuse aujourd'hui !
Que dis-je, mégoteuse, même ;) !
RépondreSupprimerHélène, en effet, même si les deux produits sont assez différents, le côté très musqué-baumé de Volutes a de petits côtés Musc Ravageur.
RépondreSupprimerThierry, je le vois un peu plus côté Felanilla que Tonka Impériale, dont il n'a pas les aspects gustatifs (mais il n'a pas non plus le côté métallique-safrané du Parfumerie Générale).
RépondreSupprimerAlizarine, c'est également le seul reproche que je pourrais faire au parfum. Mais comme il arrive que la tenue varie selon les personnes et les perceptions, je n'osais pas me prononcer définitivement.
RépondreSupprimerCela dit, pour le nom, en effet vous mégotez ;-) car tout de même, c'est un si joli mot...
Un de mes coups de coeur également, de ceux que je ne porterai pas, mais que j'offrirai certainement. Il y a des parfums que je préfère sentir sur mes proches que les porter moi-même, non point qu'il soient moins beaux, au contraire parfois, mais parce que tout simplement je me sens déguisé en les portant. Ce Volutes dont j'aime beaucoup le nom, je sens bien que je vais avoir très envie de loger mon nez dans le cou qui le porte... Dans le fond, parfois j'aime bien qu'un parfum n'ai pas beaucoup de sillage ça donne l'occasion de se rapprocher!
RépondreSupprimerMais la tenue m'a semblé excellente par contre...
DAU, c'est vrai, il y a des parfums qu'on aime mais qui ne collent pas -- je dis en général que je ne peux pas y habiter, seulement visiter... Une amie dit de ceux-là: "Ils marchent à côté de moi".
RépondreSupprimerEn tous cas, je suis ravie que plusieurs personnes soient d'accord sur la beauté de ce Volutes!
c'est marrant, je me dis que ce parfum là, qui est aussi à mon nez une réussite, aurait dû être leur 34 (qui est tellement atroce !). Pour moi, plus que le tabac, il sent la cire des bougies, il sent la fusion des odeurs et des univers. Il est très beau, même si il est vrai que le sillage n'est pas expansif. Seul défaut pour moi, qui n'ai pour l'heure testé que l'eau de toilette, il m'évoque un peu la pâte à modeler de nos écoles. c'est très beau comme souvenir, au demeurant, mais un brin trop régressif, peut-être, pour mon humeur actuelle ?
RépondreSupprimerEn tous les cas, comme DAU, je trouve que c'est un parfum parfait à offrir. Pas casse-gueule, de bon goût, assez universel en somme. je me répète, c'est lui le vrai 34.
LucasDries, j'avoue que je n'ai pas tellement le 34 dans le nez, mais je comprends, pour le côté "cire", qui vient de l'aspect un peu gras de l'iris, du cuir, de la facette miellée du tabac... Quant à la pâte à modeler, comme je n'ai pas été petite fille en France, pas sûr qu'on ait les mêmes références.
RépondreSupprimerBonjour!
RépondreSupprimerJ'ai testé sur peau les deux concentrations de Volutes. J'avoue être un peu déçu. Mes attentes étaient peut-être trop élevées, je trépignait d'impatience. Et là, je trouve que Diptyque aurait dû/pu se lâcher complétement sur cette création, au demeurant très belle. Je sens une sorte d'auto-restriction dans Volutes. L'idée d'un bel orientale pour signer un retour en force était bien vue. C'était l'occasion de signer un parfum de caractère. Je trouve que cela a été un peu gâché par cette retenue, cette timidité qui se ressent (je suis d'accord avec Alizarine) jusque dans la tenue et le rayonnement du jus. J'ai l'EDP sur le poignet en ce moment même et le moins qu'on puisse dire c'est qu'il ne tient pas à se faire remarquer. Je l'aime bien hein, les matières sont belles et bien orchestrées, c'est sûr. Toutefois, je voyais un parfum moins lisse, avec plus de corps, un parfum "charnu". Même si je comprends que le nom peut autoriser une telle interprétation, ça peut se défendre. Pourtant, là d'où je viens, les gens se parfument encore leurs tenues "à travers la fumée", et côté sillage et tenue enveloppante c'est autre chose. Cela me conduit à penser que Volutes serait peut-être finalement un parfum d'habits...
Bref, il va falloir que je me penche sur Vero Kern :D
Saxo
"Je trépignais"!
RépondreSupprimerRhoo la la. Il faut se relire parfois!
Saxo
Saxo, pour avoir travaillé sur le développement d'un parfum (et quelques autres en cours), j'ai appris que pour gagner en volume, il faut forcément altérer la note. D'où dilemme: si on adore la note, si c'est exactement ce qu'on veut, est-on prêt à sacrifier le sillage? Cela dit, je ne sais pas si c'est ce qui s'est produit chez Diptyque puisqu'au moment du lancement en présence de Fabrice Pellegrin, je n'avais évidemment Volutes sur la peau que depuis quelques minutes... Donc j'ignore comme les décisions sur les formules finales ont été prises, et s'il s'agit bien d'une volonté de créer des parfums en sourdine -- chose qui va plutôt dans le sens du marché. Les accros aux "bombes à sillage" ne sont pas forcément légion!
RépondreSupprimerBonjour chère Denyse!
RépondreSupprimerJ'ai récidivé plusieurs fois avec Volutes. J'aime beaucoup l'EDT, c'est, presque, un coup de cœur... mais vraiment j'hésite à cause de la diffusion - et puis on verra avec le père noël.
Alors en attendant, j'ai craqué sur Oriental Lounge (TDC) - grâce à une promo imbattable! Quelle douceur enveloppante! Il est là sans s'imposer, sans vous asphyxier. Même si j'étais plutôt en quête d'un beau parfum légèrement tabacé, je n'ai pas à me plaindre d'avoir jeté mon dévolu sur ce néo-oriental qu'est Oriental Lounge.
Bonne journée!
Saxo
Saxo, dans l'un et l'autre cas le choix est bon! Pour Volutes en eau de toilette, j'ai posé la question à Fabrice Pellegrin: il dit que le problème de la diffusion ne s'est jamais posé lors des tests, mais qu'il s'agit peut-être d'une anosmie à certains muscs, très présents dans la formule.
RépondreSupprimer