La composition de L’Eau Argentine d’Iunx reflète
les deux sens du mot: le pays, qui tire son nom du Rio de la Plata, la « rivière
d’argent » mais aussi l’épithète qui qualifie un son clair comme celui que
rend l’argent – le métal, s’entend – voire sa couleur lunaire.
L’Argentine, donc, avec une dominante de maté, cette
plante consommée en infusion aux arômes amers, fumés, foin et tabac. Et
l’argentin, avec le tintement métallique des ionones, présentes naturellement
dans le maté tout comme dans le thé, les violettes et même les roses – même la
couleur de l’argent est évoquée dans un effet iris.
D’ailleurs, en détournant le nez de l’album de
vieilles épreuves sur gélatine-argent représentant la pampa (feuilles de maté
et odeurs d’herbes sèches perlées de givre) ou de goélettes transatlantiques en
route pour Buenos Aires (odeurs fumées des cordes de chanvre), on effleure une
houppette chargée de poudre de riz à l’ancienne (la paille de riz figure dans
les notes). Cet accord rose-violette-musc veloute l’amertume crissante des
tanins du maté, ce qui donne à L’Eau Argentine une texture fine et sèche à deux
grains, l’un râpeux, l’autre lisse.
Les parfums d’Olivia Giacobetti sont assez
elliptiques pour laisser passer d’autres histoires que celles qu’elle fournit,
et bien qu’elle dise que L’Eau Argentine est une « eau des sages »,
il n’est pas interdit d’imaginer une belle de nuit fardée tournoyant des bras
d’un marin à ceux d’un gaucho dans un claque de Buenos Aires à l’ère de Gardel…
L’argent pourrait aussi bien être ce qui se cache derrière le miroir.
L’Eau Argentine, lance en 2003, a été récemment rééditée. Elle est
exclusivement disponible à la boutique de l’Hôtel Costes, à Paris (130€ les
150ml) ainsi que L’Éther, L’Eau Blanche, L’Eau Baptiste, L’Eau Givrée et L’Eau
de Sento.
Photo: Faces 5 de Sally Mann
J'ai été sentir récemment cette Eau Argentine dont j'attendais le comeback avec impatience, j'ai été un peu déçue: mon eau Iunx préférée semble avoir été reformulée. Le foin et la poudre dominent trop nettement, là où la version originale m'évoquait dans ses notes de tête le parfum émouvant d'un maté bien chaud, bombilla en argent plongée dedans en prime. Le monsieur de la boutique confirme que l'Eau Baptiste a été reformulée, il préfère d'ailleurs la nouvelle version. Pour l'Eau Argentine il ne sait pas, mais mon nez me dit que oui. Snif.
RépondreSupprimerBénédicte, c'est bien dommage... Surtout quand on connaît le vrai maté. Sûrement encore une affaire de règlementation... Mais n'ayant pas fréquenté l'original, je le trouve tout de même beau.
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