Comme chaque saison, un carnet de coups de cœur qui ne reflète pas forcément ce que je porte (je tomberais dans la redite) mais ce qui m’a intéressée dernièrement…
L’Eau d’orange verte d’Hermès. S’il ne fallait qu’une eau de cologne, ce serait peut-être celle-là. Le classique composé par Françoise Caron en quatre ou cinq essais (dit-elle dans La Cuisine des nez) amarre l’amertume aromatique du zeste d’orange à la fraîcheur verte et crissante de la menthe et du buchu sur fond boisé. Le résultat a l’évidence d’une chose de la nature.
L’Eau Chic des Parfums de Nicolaï. Si vous trouvez l’accord géranium-menthe du Géranium pour Monsieur de Dominique Ropion trop puissant – il m’est arrivé de m’y brûler le nez – la version composée par Patricia de Nicolaï en propose une approche plus discrète, qui fait libère l’accord aromatique (lavande et camomille romaine) et le fond boisé. Aussi net, élégant et facile à porter qu’un chemisier en coton blanc.
Le Jardin du Poète d’Eau d’Italie. Évocation du jardin de Marina Sersale et Sebastian Alvarez Murena (les propriétaires d’Eau d’Italie) à Positano, inspiré par l’odeur quasiment florale d’une orange verte. L’intérêt principal du parfum de Bertrand Duchaufour réside dans un développement qui fait passer des zones vertes et ombragées du jardin – rose, cyclamen, muguet – au fond sec et chypré (foin, mousse, immortelle) qui forme son paysage d’arrière-plan, à la manière d’un tableau de la Renaissance italienne. La forme olfactive correspond donc au fond italien. Il s’agissait d’y penser.
Bois de Coton des Parfums d’Orsay. Olivia Giacobetti a le don de créer des environnements olfactifs émouvants. Son Bois de Coton, parfum d’intérieur, sent le linge propre et le soyeux argenté du bois flotté -- effets des aldéhydes, d’un iris particulièrement sec été du chêne. Je le vaporise désormais sur mes serviettes, mes draps et mes peignoirs, mais il pourrait tout aussi bien servir de parfum à porter sur un teeshirt ou une veste en lin.
Safran Nobile de Technique Indiscrète. Le Belge Libertin Louison avait entamé une brillante carrière de jeune prodige de la mode lorsqu’il a décidé, semble-t-il, qu’il préférait devenir parfumeur, en s’inspirant notamment d’anecdotes de sa propre vie. En l’occurrence, le banquet de mariage d’une amie à un jeune Indien qui s’avéra être un prince, organisé passage Brady. Son Safran Nobile, qui combine les notes cuirées, médicinales et légèrement aigres du safran à un accord « riz » lacté, à la rose et au musc, offre une version adoucie (et donc plus facile à porter) de l’idée développé par Giacobetti pour L’Artisan Parfumeur.
Indochine de Parfumerie Générale. Les notes gourmandes sont si persistantes dans la parfumerie de Pierre Guillaume qu’on peut se demander s’il a trop souvent été privé de dessert… Mais son Indochine, qui sortira cet automne, équilibre le sucré du miel du Laos et le lacté poudré du benjoin par le vibrant du poivre et le fumé du tanakha, préparation cosmétique traditionnelle aux accents de santal. Très belle variation sur le genre oriental, version extrême, qui s’exprime délicieusement dans la chaleur.
Sweet Redemption de By Kilian. C’est en été que les fleurs blanches s’expriment le plus voluptueusement, et j’ajouterais volontiers à mon répertoire saisonnier (Vamp à NY, Nuit de Tubéreuse et Amoureuse) cette fleur d’oranger sur fond baumé qui clôture la collection L’œuvre noire.
Sharif de Profumo Italia. Une composition dense et sombre qui joue sur les effets cuirés, baumés et animalises suggérerait plutôt un parfum d’hiver. Mais après tout, ces odeurs-là s’exhalent depuis des siècles des caravanes et caravansérails, poussées par les vents du désert… Je reviendrai très bientôt sur ce magnifique parfum proposé par Abdes Salam Attar.
Pur Désir de Fleur d’Oranger d’Yves Rocher. En sentant Le Parfum d’Élie Saab chez Sephora, je me suis exclamée à ma voisine de rayon que pour quatre fois moins cher, je trouverais une meilleure fleur d’oranger chez Yves Rocher : dont acte. Cette création d’Annick Menardo, avec son petit côté acidulé, fait partie des plaisirs pas chers dont on aurait tort de se priver. Comme tous les Pur Désir, je l’utilise souvent en parfum d’ambiance.
L’Heure Folle de Cartier. La framboise est l’un des rares fruits que l’industrie agro-alimentaire n’a pas encore réussi à drainer de toute saveur pour booster sa taille, son apparence et sa longévité en rayon. Je m’en gave lorsqu’elle est de saison, mais sans jamais omettre de respirer son parfum, avec ses facettes vertes et violette. L’Heure Folle, hommage de Mathilde Laurent à Mûre et Musc, traduit cette sensation de naturalité… La dixième Heure de Parfums pâtit de la piètre réputation qu’ont les notes fruits rouges auprès des connaisseurs, mais c’est la seule de cette famille que je porte volontiers, pour son rendu pointilliste de toutes les facettes du buisson, feuilles, brindilles et épines comprises.
Pour d'autres Top Ten (en anglais), cliquez sur:
Perfume-Smellin' Things
Et rendez-vous la semaine prochaine pour une grande nouvelle...
Illustration: Françoise Rubartelli par Irving Penn
Et rendez-vous la semaine prochaine pour une grande nouvelle...
Illustration: Françoise Rubartelli par Irving Penn
Je vais peut-être en faire bondir plus d'un,mais cet été, je craque pour Cléa d'Yves Rocher, l'odeur presque exacte du savon Camay (voir la pub "Et si on sortait?" "Et si on restait?"). J'en ai un stock impressionnant chez moi et je l'associe à tous les fleuris aldéhydés savonneux type Calèche et Calandre, les notes chyprées en moins.Il serait plus proche du Dix, en fait, en moins classe, évidemment, en moins poudré, surtout.Bref, je l'aime : une crème de savon, mais je crains qu'il ne disparaisse (plus qu'une référence au catalogue...).J'aimerais bien savoir qui a créé (en 1980 ou 1981) ce joli parfum .
RépondreSupprimerZab, pas de raison de bouder Yves Rocher, ils ont d'excellents produits, souvent des contre-types mais tellement accessibles!
RépondreSupprimerEn fait le marketing que l'on fait autour de la parfumerie selon les saisons me derange. De toutes facons avec les vagues de chaleur que l'on a eu dans le Nord-Est des Etats-Unis, on est tous a 95% du temps dans la climatisation, toujours reglee glaciale par les americains, donc tant mieux, je reporte Mitsouko, versions vintage denichees sur ebay, que j'avais laisse tombe il y a deux/trois ans. Bien sur le nouveau Lutens, Vitriol d'Oeillet que j'aime beaucoup et Nuit de Cellophane, pour les sorties.
RépondreSupprimerEmma
Emma, il y a une part de marketing, d'accord, mais en même temps, on peut avoir le désir de marier les parfums avec ce qui pousse selon les saisons. Remarque, de nos jours, on trouve de tous les fruits toute l'année, et comme tu dis, à plein d'endroits on perd le sens des saisons avec la clim'... Avoir envie de vert au printemps ou de pêches et de fleurs blanches en été, c'est peut-être une façon de se reconnecter?
RépondreSupprimerDisons que les besoins de climatisation dans une ville comme Paris ou San Francisco n'ont rien a voir avec New York, ou l'on se protege l'ete 24H/24 de la chaleur mais egalement de l'humidite excessive. Imagine, on a eu 100+ degres Fahrenheit pendant trois jours consecutifs. J'ai passe tout le mois de juillet dans la clim, au point ou pendant mes cours au FIT, il y faisait un froid tellement glacial, j'emmenais dans mon sac un petit haut cardigan en cashmere avec le flacon de mon parfum du jour bien sur ;-))
RépondreSupprimerEmma, j'ai passé la moitié de ma vie à Montréal dans les mêmes conditions d'enfer climatisé. Je connais!
RépondreSupprimerJe suis aussi une adepte du Pur Désir de Fleur d'oranger (ainsi que du PD de lilas, et je déplore la disparition du PD de gardenia) depuis des années, pas trouvé mieux dans cette gamme de prix pour une fdo tout à fait correcte. J'en ai toujours un flacon à la maison, senteur adorable les soirs d'été très chauds, après la douche, quand on ne sort pas et qu'on n'a pas forcément envie de se parfumer. Pas de quoi se priver, on peut s'en asperger à l'envi. Merci Madame Ménardo :-)
RépondreSupprimerLamarr, j'ai écrit au service client d'Yves Rocher pour demander si d'aventure ce Gardénia n'allait pas reparaître dans les rayons... C'est niet, mais en revanche, on m'a offert un parfum de mon choix pour m'en consoler. J'ai opté pour la Rose Absolue de Christine Nagel.
RépondreSupprimerCarmen, bien triste nouvelle pour le Gardenia :(
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