mercredi 16 juin 2010

Mon cours sur les parfums au London College of Fashion... Un aperçu


Crevée ? C’est peu dire. Ce cours intensif de trois jours au London College of Fashion – couplé à des réunions avec mon agent, mon éditrice et l’équipe de HarperCollins ainsi qu’une série de diners – m’ont mise dans un état justifiant un rapatriement sanitaire, au lieu de quoi je suis montée à bord d’un Eurostar essentiellement peuplé, m’a-t-il semblé, de bambins hurlants.

Et alors, c’était comment ? Génial, forcément. Une fois de plus, j’ai eu des participants de 20 à 60 ans et de toutes les origines, amoureux des parfums ou simples curieux. Mais ce qui m’a le plus étonnée, c’était que cette fois, non seulement il y avait une anthropologue qui enquête sur le monde du parfum, mais aussi plusieurs habitants de ce monde ou de ses contrées limitrophes (distribution, vente, parfums de maison, cosmétiques), ainsi qu’un biochimiste indien qui distille des essences naturelles et une consultante en image venue exprès de Hong Kong ! Inutile de dire que les questions et les commentaires, alimentés par la diversité des approches et des cultures, ont fusé de partout, et pas qu’en ma direction…

Je préfère ne pas trop déflorer le contenu précis du cours, ce qui gâcherait la surprise aux futurs participants. Disons en gros que le cours se divise en trois thèmes, un par jour, chacun apportant un éclairage très différent à l’appréciation du parfum :

- Premier jour, exploration du vocabulaire et de la grammaire de base : apprendre à lire les facettes de diverses matières premières ; fouiller sous les jupes du jasmin en découvrant certaines des molécules qui le composent ; créer des illusions olfactives ; trouver des accords en jouant à « marabout-bout de ficelle » avec les matériaux et les bases, puis en repérant ces accords dans des compositions…


- Deuxième jour, étude de certains des parfums les plus marquants de l’histoire de la parfumerie (dont plusieurs prélevés dans ma collection de vintage), situés dans leur contexte historique, culturel et vestimentaire. Mais aussi une « coupe verticale » de l’histoire des chypres fruités à travers les âges, en commençant par Mitsouko pour finir par Jubilation 25.


- Troisième jour, l’exploration des pistes les plus fécondes de la parfumerie contemporaine, avec un accent sur la parfumerie de niche et d’auteur, et plus particulièrement sur des créateurs comme Jean-Claude Ellena, Isabelle Doyen, Olivia Giacobetti, Mathilde Laurent, Bertrand Duchaufour et Sandrine Videault.

C’est ce chapitre que j’aimerais le plus développer, car faute de temps j’ai dû faire l’impasse sur des maisons telles que Comme des Garçons et Etat Libre d’Orange ou des parfumeurs comme Christophe Laudamiel ; mais j’aimerais aussi aborder à l’avenir des pistes qui me semblent très intéressante dans les parfums maison, notamment chez Frédéric Malle et Cires Trudon.

Impossible de résumer ces 20 heures trépidantes, et olfactivement exténuantes. Moment de comédie : je pérorais avec assurance sur la façon dont Olivia Giacobetti avait reproduit l’odeur de la carotte, tout en me demandant pourquoi mes ouailles avaient l’air vaguement perplexe (m’enfin, c’est clair, non ?), lorsqu’un garçon a lâché : « Curieux, cette facette noix de coco… ». Je renifle enfin la mouillette que j’agitais avec enthousiasme dans cette pièce sursaturée d’odeurs. J’avais vaporisé les mouillettes de Love Coco au lieu d’I love les Carottes. J’en ai profité pour souligner que cela démontrait à quel point nous sommes sensibles à la suggestion en matière d’odeur… Pirouette de prof.

Moment d’émotion : à la fin du cours, j’ai fait un tour de table pour demander aux participants quels parfums les avaient les plus frappés au cours de ces trois jours. J’ai commencé par un monsieur indien qui distille des essences pour la médecine ayurvédique et les parfums à brûler dans les temples. Il avait bien sûr parlé lors des séances consacrées aux matières premières, sujet qu’il possède bien pour les produits naturels, pas du tout pour les synthétiques. Mais à partir du moment où nous avions abordé les compositions, il s’était tu. Je l’ai donc interrogé en premier. Et là, impossible de le faire taire. Le Manoumalia de Sandrine Videault, a-t-il dit, était le parfum dont il avait toujours rêvé, l’odeur d’une fleur qu’on appelle chez lui la Reine de la Nuit, qui embaume après le coucher du soleil à des kilomètres à la ronde et se flétrit le matin venu… Intarissable, presque les larmes aux yeux…

Après tout, si on aime les parfums, c’est pour ça, non ? Mission accomplie.

Mes remerciements les plus chaleureux à tous les participants, ainsi qu’aux parfumeurs et aux maisons qui m’ont fourni échantillons et matières premières, et à Basia Szkutnicka, Hannah Svensson, Reid Aiton et Karin Johansson du London College of Fashion.

6 commentaires:

  1. Ton cours est forcément passionnant parce que tu l'es TOI, passionnante et passionnée. Et à chauqe fois, j'aimerais beaucoup y participer. A très vite. Je pourrai même fournir un Coca light glacé!!!

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  2. Rebecca, merci, mais je ne vois pas ce que je pourrais t'apprendre!

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  3. rolalal, mais qu'est ce que j'adorerais assister à un de tes cours, ils ont l'air fantastiques

    dans une autre vie peut etre ;)

    en tout cas, merci pour ce resumé

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  4. Véro, je songe toujours à organiser des après-midi chez moi. Mais le dimanche est souvent le seul jour où j'ai un "tunnel" d'écriture pour mon livre et j'hésite à y renoncer!

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  5. Que dire de plus sinon que je me joins à Rebecca pour te dire à quel point nous serions intéressés par des séances parisiennes...
    100% des commentateurs francophones sont pour : c'est scien-ti-fique !

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  6. Thierry, bon bon, c'est quasiment l'émeute à ce que je vois! ;-)

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