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lundi 8 février 2010

Tiaré d'Ormonde Jayne: printemps aux tropiques



Tout de suite après avoir donné mon cours de décembre au London College of Fashion et avant de sauter dans l’Eurostar, je me suis précipitée dans la petite boutique laquée de noir d’Ormonde Jayne, excellente maison londonienne dont c’est l’unique point de vente (si vous comptez vous y rendre à Londres, munissez-vous d’un plan détaillé : la boutique est située dans une galerie qui donne sur New Bond Street et elle n’est pas facile à repérer).

Les affaires roulaient bien dans la boutique en cette période d’avant-Noël : au moins sept ventes durant la demi-heure où j’y ai trainé, faites pour la plupart à des hommes en mission pour leur femme ou leur petite amie.

J’ai tout de suite reconnu Linda Pilkington, la créatrice d’Ormonde Jayne, une blonde menue et ravissante dont les bureaux sont à l’étage : je me suis identifiée, nous avons bavardé un peu (mais en « off »). Elle m’a cependant permis de préciser qu’elle projetait de multiplier les points de vente d’Ormonde Jayne (hélas pas en France, d’où l’on ne peut se procurer ses parfums que sur son site), mais pas d’étoffer sa ligne pour le moment car elle préfère mettre en valeur les parfums qui y figurent déjà, et dont elle est fière à juste titre. Tiaré, le dernier joyau d’Ormonde Jayne, sera donc le dernier lancement pour deux ans.

Pour ceux et celles qui connaîtraient déjà la maison, on pourrait comparer Tiaré à la face diurne de son sensationnel Ormonde Woman : l’un et l’autre sont verts, mais alors que la verdure obscure du second évoque une forêt de Brocéliande, le premier nous plonge dans un verger tropical. Comme la plupart des compositions d’Ormonde Jayne (orchestrées par le parfumeur allemand Geza Schoën si mes renseignements sont bons), Tiaré baigne dans le brouillard poudré-boisé d’iso-E super et de cèdre qui est un peu la signature de la maison (et qui a parfois tendance à prendre le dessus lorsque le parfum vieillit), allié à des notes salicylées intenses et narcotiques qui lui confèrent la texture serrée du velours blanc. C’est cette texture de pétale qui distingue Tiaré des parfums auxquels on l’a comparé à sa sortie, notamment Cristalle de Chanel ou Private Collection Jasmine White Moss d’Estée Lauder. Les notes de mandarine et de citron vert traversent cette densité par leur amertume verte ; contrairement à Cristalle, cet effet de verdeur n’est pas produit par le galbanum. Le parfum évoque cependant les chypres verts des années 70 avec sa base moussue (il s’agit très probablement d’Evernyl plutôt que de mousse de chêne ou d’arbre).

Quant à l’absolue de tiaré qui lui donne son nom, allégé par un cœur floral vert de muguet et de notes jasminées légères, il sert plutôt à apporter une touche crémeuse à la composition qu’à produire l’effet tropical attendu. L’effet dégagé est celui d’une féminité printanière et aimablement sensuelle, plus naturelle que celle de Jasmine White Moss et un peu moins jeune fille rangée que celle de Cristalle : les amoureux de l’un ou l’autre seront sans doute séduits.

Ormonde Jayne propose un jeu de onze échantillons découverte à commander sur son site. Hélas,Tiaré n'y figure pas, mais je vous le recommande, plusieurs des parfums sont excellents.

Quant à moi, j’ai voté avec ma Visa et suis ressortie de la boutique avec 50 ml de l’eau de parfum. Elle m’aidera à patienter en attendant avril…

Image de Sofia Sanchez et Mauro Mongiello.


6 commentaires:

  1. Hum, hum...
    Faudra-t-il attendre que tu troques tes fourrures contre quelque mousseline pour avoir la chance de le sentir dans ton cou ?
    Je ne voudrais pas faire mon jaloux il m'est idée que d'autres ont déjà eu cette chance avant moi...

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  2. Thierry, eh bien non, pas dans mon cou... Mais je l'ai déjà porté plusieurs fois et tu pourras bien sûr le sentir!

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  3. L'absolu de tiaré.
    Cet ingrédient m'étonne, car Turin a décrit qu'il était absolument hors de prix, que sa production était très infime, et que son odeur était mauvaise.
    Que les parfumeurs passaient donc forcément par la case "reconstitution".
    (mise à jour du printemps 09 de "perfume the guide", dans manoumalia, et le nouvel acqua allégoria)
    Je ne dis pas ça pour sous-entendre qu'il y a de la langue de bois chez Ormonde Jayne, mais plutôt que s'il existe un tel absolu, ma curiosité s'en trouve accrue.

    (absolu rare et cher, et odeur mauvaise, il le dit aussi pour le mimosa, sauf que là même la reconstitution n'est plus possible à cause des limitations sur l'heliotropine.)
    J'ai une vrai curiosité pour Farnesiana vintage, d'autant que les carons vintage sont plus rare à trouver que les Guerlain.

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  4. Julien, il existe bien, cet absolu. Il est fabriqué par IFF. Linda m'a parlé assez longuement de ses problèmes d'approvisionnement d'ailleurs.
    J'ai aussi de l'absolue de mimosa à la maison, je ne trouve pas que ça sente mauvais: il est d'ailleurs assez reconnaissable pour avoir été identifié par certains de mes stagiaires du LCF.
    J'ai beaucoup aimé et porté jadis Farnesiana, dont il me reste un flacon (un peu abîmé). En effet, c'est presque introuvable sur ebay. Je n'ai pas senti celui qui est proposé aujourd'hui.

    Par là-dessus, je me dis qu'il est temps que d'autres bouquins que celui de Luca paraissent pour qu'il ne soit pas la seule source d'info jugée digne de foi...

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  5. Ah? ça c'est vu que c'est mon livre de chevet ? ^_^!
    Il faudrait que je me trouve une bibliographie de livres, je commence à l'avoir vraiment ratissé le Turin&Sanchez, même si je ne me lasse pas de lire tout ce qu'ils écrivent.
    De nouveaux livre, un peu de sang neuf. (j'ai lu le "que sais-je" d'Ellena, intéressant... pour connaitre Ellena :p )
    (J'ai commencé ma passion parfum début 2008, en comparaison je trouve que je m'en sors pas mal)

    Est-ce que vous avez des livres sur le parfum à recommander ? Des coup de coeur ?

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  6. Julien, en effet, vous êtes manifestement doué pour ça!
    Quant aux livres, il faut déjà lire les ouvrages d'Annick Le Guérer, ainsi que "Le Miasme et la Jonquille" d'Alain Corbin. Et tenter de mettre la main sur celui, épuisé, de Guy Robert (Les Sens du Parfum). Le guide de Rebecca Veuillet-Gallot est encore disponible. Voici un lien bibliographique très riche:
    http://www.scentedpages.com/default.html

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