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lundi 3 juin 2013

Gardez-moi de Bertrand Duchaufour pour Jovoy : Maîtresse fleur


Le gardénia serait-il la nouvelle tubéreuse ? Fleur blanche, fleur verte, réinterprétable au gré des parfums puisqu’il n’en existe aucun extrait, on peut le jouer fraichement coupé et gorgé de suc tout comme on peut lui faire frôler la corruption. La note figure dans plus d’un lancement mainstream (de Jour d’Hermès à Nina l’Eau en passant par Bottega Veneta Eau légère). Elle a récemment eu la vedette dans quelques soliflores marquants. Avec Une voix noire, Serge Lutens et Christopher Sheldrake la cueillent dans la chevelure de Billie Holiday pour la tremper dans la confiture et le tabac. Carlos Huber et Rodrigo Flores Roux d’Arquiste la piquent à la Boutonnière d’un dandy, et l’éclaboussent d’une cologne aromatique.

Pour Gardez-moi, François Hénin de Jovoy a demandé à Bertrand Duchaufour une vamp florale en guise d’hommage à un parfum du même nom lancé en 1926. Lequel Duchaufour s’est exécuté avec une composition aldéhydée très fleur sculptée dans le savon blanc au réglage rétro maximal – c’est-à-dire, puisque c’est tout de même Duchaufour, que ça vire très vite à la modernité. Le gardénia domine ce bouquet, tendance dominatrice des beaux quartiers plutôt que corolle meurtrie. L’effet mousseron de la fleur lorsqu’elle se flétrit reste discret (on n’est pas dans l’hystérie du regretté Velvet Gardenia de Tom Ford). C’est le côté vert-fruité-aqueux qui ressort – une goutte de jus de melon, une lichette de banane pas mûre, et un « bouquet framboise » revendiqué dans le dossier de presse.

D’après le charmant monsieur Hénin, le gardénia était une fleur qu’on offrait à sa maîtresse dans les Années Folles. C’est pourtant une indiscrète, capable de tatouer un homme de la tête aux pieds. À ce titre, Gardez-moi remplit son programme – ou sa menace ? Sa fleur colle à la peau et affiche son sillage comme une irrégulière qui refuserait la rupture. D’où l’illustration ci-dessus : l’aristocrate secrètement sentimentale jouée (Mila Parely) s’accrochant à Marcel Dalio, pusillanime marquis de la Chesnaye, dans La Règle du jeu de Jean Renoir. Parce que tous les prétextes sont bons pour évoquer Renoir. Mais aussi parce que la féline Parely évoque le chat noir du flacon créé par Baccarat pour le premier Gardez-moi (ordre intimé par plus d’un chat, entretenu comme une maîtresse…). Après tout, le gardénia a bien inspiré un parfum appelé Ma Griffe... Même les fleurs sans épines peuvent faire saigner.



4 commentaires:

  1. La bouteille chat - je la veux!! Le parfum Jovoy, faut sentir. Mais j'ai déjà acheté Les Jeux Sonts Faits et je contemple Private Label... Les nouveaux parfums Jovoy sont bien meilleurs que ceux que j'ai senti il y a quelques années. J'ai hâte de visiter la boutique parisienne.

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  2. Tara, n'est-ce pas qu'elle est sublime? Quand j'étais petite, je convoitais celle de Max Factor (nettement plus kitsch, je l'admets), elle aussi en forme de chat noir.

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  3. Monsieur Hénin est effectivement charmant, j'ai un excellent souvenir de mon passage à sa boutique rue Daniela Casanova. Le Gardénia, une bonne excuse pour y retourner...

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  4. Columbine, d'autant plus que la nouvelle boutique rue de Castiglione est magnifique -- François Hénin a souvent eu la gentillesse de m'y laisser faire salon avec des journalistes ou des visiteurs de l'étranger. Accueil toujours parfait!

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