More to Read - Encore des lectures

jeudi 31 janvier 2013

"Comme un ruban sur le doigt d'une femme": 1932, nouvel Exclusif de Chanel (et tirage au sort)



En 1932, en pleine Dépression, la femme qui avait ennobli le bijou de fantaisie décide de créer une collection de bijoux de diamants qu’elle expose dans son hôtel particulier. 
« Les moyens les plus divers sont légitimes, dans la profession que j’exerce, pouvu qu’ils ne soient employés que dans le vrai sens de la mode. La raison qui m’avait amenée, d’abord, à imaginer des bijoux faux, c’est que je les trouvais dépourvus d’arrogance dans une époque de faste trop facile. Cette considération s’efface dans une période de crise financière où, pour toutes choses, renaît un désir instinctif d’authenticité, qui ramène à sa juste valeur une amusante pacotille.

Si j’ai choisi le diamant, c’est parce qu’il représente, avec sa densité, la valeur la plus grande sous le plus petit volume. Et je me suis servie de mon goût pour ce qui brille pour tenter de concilier, par la parure, l’élégance et la mode. »
(Texte du catalogue de l’exposition « Bijoux de diamants créés par Chanel », 1932)
Pour illustrer ce catalogue, Chanel a, comme toujours, du flair pour dénicher le génie. Robert Bresson, 31 ans, est encore photographe à l’époque : il ne réalisera que dix ans plus tard son premier long-métrage, Les Anges du Péché. Mais son esthétique dépouillée – janséniste, dira-t-on – est déjà à l’œuvre dans ses photos. C’est André Kertész qui capte l’ambiance teintée de surréalisme de cette exposition où les joyaux s’exhibent sur des bustes de mannequins fin de siècle plutôt que sur velours noir


L’intrusion d’une couturière dans le monde de la haute joaillerie hérisse à tel point la place Vendôme que Chanel est contrainte de faire démonter ses bijoux pour les rendre à la Diamond Corporation de Londres – ces pièces qui auraient pu être éternelles se sont avérées en fin de compte moins durables son indétrônable N°5.

Depuis, la maison a pris sa revanche en s’installant au N°18 de la place Vendôme, dans un hôtel particulier qui lui appartient désormais. Pour célébrer le 80ème anniversaire de l’exposition de 1932, elle a ouvert des ateliers de joaillerie in-situ, présenté une collection de joyaux « 1932 » et confié à Patrick Mauriès la rédaction d’un ouvrage somptueusement illustré, Les Bijoux de Chanel (Éditions de La Martinière). 

L’élégante érudition de l’auteur, ex-élève de Roland Barthes, grand connaisseur de la mode et co-fondateur avec Franco Maria Ricci du magazine d’art FMR, permet à ce beau livre de dépasser son statut d’ornement de table basse : le texte est un très bel essai sur la paradoxale philosophie du bijou de Chanel.




La ligne des Exclusifs de Chanel s’est également enrichie d’un nouveau parfum, 1932. Jusqu’ici disponible aux seuls clients de Chanel Joaillerie et présenté à la presse l’été dernier, il est mis en vente le 1er février dans toutes les boutiques. Encore un hommage à la joaillerie de Chanel, donc, puisque c’était déjà le cas du N°18. 18 + 1 = 19. 31 (rue Cambon) + 1 = 32. Chanel, férue de numérologie, raconte-t-on, n’aurait pas renié les equations qui ont donné lieu à ce 1932.

Et de fait, les facettes limpides de l’ambrette du N°18 – poire, rose, iris, musc – se sont glissées dans la formule de 1932, tout comme le jasmin légèrement banane-pêche de 31 rue Cambon, mais sans la chaleur de l’ambre et l’aspect délicieusement blet de la note florale ce dernier. D’ailleurs, 1932 est présenté par Chanel comme un jasmin, « qui est au parfum ce que le diamant est à la joaillerie… l’essentiel », déclare Jacques Polge dans le dossier de presse.

Mais cette fleur dont la forme étoilée évoque l’un des motifs de la collection de joaillerie « 1932 » est brodée sur un iris de qualité époustouflante, d’une souplesse de peau de chamois. Et l’iris est tout autant que le jasmin la star de ce parfum. Toujours selon le dossier de presse, ce traitement tout en souplesse des matériaux correspond à la façon dont Chanel avait voulu traiter ses bijoux, sans fermoirs ni montures apparentes, s’enroulant « comme un ruban sur le doigt d’une femme »… Bien vu.Ce jasmin joue d'ailleurs plutôt sur la fraîcheur et la luminosité de la note que sur la chair florale narcotique.

Comme deux de mes Chanels contemporains préférés, 31 rue Cambon et N°5 Eau Première, ce 1932 donne l’impression d’être à la fois assemblé avec une précision d’horloger et flouté. Les accros de la parfumerie de niche risque de trouver cette texture vaporeuse un peu trop sage. Pour ma part, après une décennie de potions fortes, d’aspérités, de solinotes, je suis de plus en plus séduite par ce style plus subtil… aussi. Le sillage de 1932 reste assez discret, et je l’aurais aimé plus rémanent, du moins sur moi. Mais je le trouve si ravissant que du coup, je lui ai dédié un pashmina, qui me permet de prolonger le plaisir.

J’ai assez de 1932 pour tirer au sort un échantillon de 2 ml. 

Pour participer, parlez-moi dans un commentaire de votre Exclusif de Chanel préféré (ou à défaut, de celui que vous aimeriez le mieux essayer). Le tirage au sort se terminera lundi 4 février.



Illustrations: photo du haut par Robert Bresson pour le catalogue Bijoux de diamants (1932), photo du milieu par André Kertész. Les références historiques sont tirées du livre de Patrick Mauriès.

24 commentaires:

  1. Je n'ai pas encore pris le temps de découvrir les exclusifs de Chanel et pourtant il y en a certains qui me font de l’œil! Deux exclusifs en particulier: le 18 et Beige...je n'ai pas vraiment les mots pour l'expliquer, je pense que les descriptions que j'ai lues à propos de cette pureté et simplicité y sont pour beaucoup. J'aime également la description que vous faites de ce nouvel exclusif, le sillage discret et subtil m'attire. Je recherche beaucoup ce style, il faudra que j'ose un jour pousser la porte de Chanel et demander à les découvrir. En tout cas cela me fait rêver, peut être qu'en attendant je me tournerais vers l'eau première plus accessible pour moi. Chanel, c'est le souvenir de mes 15 ans et mon père qui m'a offert ce flacon de Coco...il y avait cette jolie publicité avec Vanessa Paradis, je n'arrivais absolument pas à faire le lien entre le parfum et le personnage et du coup je n'avais pas l'impression que ce parfum me correspondait...c'était un parfum de femme pas d'adolescente. Alors je le portait avec parcimonie et c'était un peu mon trésor...

    RépondreSupprimer
  2. Je ne sais pas si j'aurais un jour l'occasion de le sentir, mais "Coromandel" me taraude. Rien que son nom, sublime et mystérieux, orientaliste et voyageur. Je l'imagine brûlant, troublant, chaud, s'enroulant sur la peau comme une empreinte.
    J'ai un faible pour son abstraction, et aussi il renvoie à des paravents; il cache sans pouvoir le faire complètement, c'est un objet qui me fascine et me trouble, entre l'opacité et le dévoilement.

    Mais ce n'est déjà plus vraiment la Chine, puisque la première fois que j'ai croisé ce nom, loin du parfum, loin de Chanel, c'était en Inde. Un tout autre voyage...

    RépondreSupprimer
  3. J'ai pris le temps de tester tous les exclusifs, guidée par une charmante (et jolie) vendeuse de la rue Cambon.En fait, je les aime tous, et c'est bien là le drame.
    Je dirais que j'ai quand même un faible pour le numéro 22 que je trouve vraiment délicieux et enveloppant mais ils ont tous cette touche "chic" qui me plaît !

    RépondreSupprimer
  4. Naty, merci pour ce joli souvenir de Coco (je me rappelle parfaitement la pub de Goude, superbe et poétique). Et certainement, vous ne pouvez pas faire erreur avec L'Eau Première, l'un de mes plus grands coups de coeurs de ces dernières années!

    RépondreSupprimer
  5. Mandine, Coromandel, c'est vrai, fait rêver rien qu'à lire le nom. Et c'est un très beau parfum.

    RépondreSupprimer
  6. Zab, je comprends le dilemme -- j'aime la plupart d'entre eux également, et j'en ai d'ailleurs plusieurs. Heureusement qu'ils sont disponibles désormais dans un format qui se prête mieux aux coups de coeur!

    RépondreSupprimer
  7. Mon Chanel Exclusif préféré est toujours le Cuir de Russie. Quand je le sens, j'imagine quelque chose en or, et l'iris est est chaud et ensoleillé, tout le contraire de l'iris de La Pausa. J'ai essayé la plupart des Exclusifs, à l'exception de Gardenia et No. 18. Je voudrais apprendre à aimer Coromandel, mais il est tout simplement pas fait pour moi. Je me demande ce que 1932 a fait de l'iris, à en juger par votre description, il serait le genre qui me parle le plus clairement.

    RépondreSupprimer
  8. Merci pour cette description et ce ressenti Denyse.(Je précise que je cède ma place dans le tirage au sort).
    Je n'ai pas encore eu l'occasion de tester ce parfum mais je trouve dans votre post des points encourageants et d'autres beaucoup moins qui m'incitent à le faire.Au rayon du positif : les références au N° 18 et au 31 rue Cambon, deux de mes Exclusifs contemporains préférés.A celui du scepticisme : la texture vaporeuse un peu trop sage et la faiblesse du sillage...Me reste à découvrir l'accord iris-jasmin.
    Et une petite question : il me semble avoir lu (oups)qu'il y avait dans la compo de 1932 une note vétiver....L'avez-vous ressentie dans l'équilibre général ? (inutile de dire que j'apprécie beaucoup cette note) lol

    RépondreSupprimer
  9. Ilia, Cuir de Russie a été mon premier Exclusif -- je me le suis offert pour mon anniversaire. C'est sans doute l'une de mes collections "exclusives" préférées. J'aimerais bien voir toute la famille alignée sur ma cheminée (celle où je ne fais pas de feu, évidemment!).

    RépondreSupprimer
  10. Aryse, en effet il y a un fond de vétiver, pas très prononcé (je le trouve plus perceptible sur étoffe après 24h). Mais la note ne domine pas. L'iris donne une petite note un peu cuirée, plutôt daim d'ailleurs, que ce vétiver doit venir renforcer.

    RépondreSupprimer
  11. Naty, quoi qu'on fasse, on loupe toujours une pétouille quand on laisse un commentaire (ça doit m'arriver dix fois par semaine).

    RépondreSupprimer
  12. Bien que je ne possede aucun des Chanel exclusifs, j'aimerais essayer
    Coromandel et Bois des Iles
    Tous les deux,ils sont delicieux et elegants
    Selon les avis les plus recents "1932" est aussi interessant
    Vaut la peine d'économiser de l'argent et
    traiter moi-même pour mon anniversaire en Août
    Phanie Constanda

    RépondreSupprimer
  13. Phanie, comme je le disais plus haut il me semble, un Exclusif est un cadeau parfait à s'offrir à soi-même pour un anniversaire!

    RépondreSupprimer
  14. Carmencanada,
    Vuos avez raison, je vais peut-etre declarer un anniversaire quelconque cette semaine et m'offrir 31 rue Cambon... Sinon Amouage Gold en extrait est aussi une belle alternative. Moi aussi j'ai mes parfums partout autour de mon appratement et meme cet hiver je n'ai pas mis le chauffage - j'ai peur de les abimer. Ca devient quand meme un petit probleme...

    RépondreSupprimer
  15. Ilia, "déclarer un anniversaire", bonne initiative! Dans le temps je m'offrais un parfum chaque fois que je signais un contrat, mais comme maintenant j'ai moins de place (et plus de parfums, et plus de contrats), j'ai abandonné! Mais tous les prétextes sont bons...

    RépondreSupprimer
  16. J'ai eu la très agréable surprise de recevoir en septembre une petit colis contenant, entre autre, les treize échantillons qui constituaient l'éventail de la collections des Exclusifs. En choisir un seul ne fut donc pas aisé.
    Pour moi c'est "Cuir de Russie", finalement sans regret (essentiellement parce que le paquet en question ne contenait pas que des échantillons Chanel).
    J'ai tout d'abord aimé l'idée de ce parfum (dont j'avais découvert le nom à huit ans en lisant un album de Yoko Tsuno...). En outre, le personnage de Gabrielle Chanel me fascine depuis plus de deux décénnies et j'aime l'idées de ses emprunts à la garde robe ou au cabinet de toilette de ses amants.
    Le premier essai ne m'a pas convaincu.
    Mais à l'essayer un fois de plus (je laisse toujours au moins trois fois sa chance à un parfum), j'ai fini par me laisser séduire par son côté abstrait, ses aldéhydes piquants, son iris si peu dissimulé. C'est cet iris qui, je crois, m'a décidé.
    Aujourd'hui, j'aime dire que, lorsque je dois me sentir fort (au sens moral du terme, je ne parle pas ici d'hygiène), j'aime à accessoiriser une veste bleu nuit à la coupe très militaire d'une bouffée de ce vieux Chanel. Au souvenir du Grand Duc Dmitri (ou du Prince Youssoupov, une autre obsession), "je me sens pousser des bottes de cheval". Et je démarre avec l'assurance d'un Grand Duc.

    En outre, ce parfum me permet d'attirer des commentaires comme "Ah quand même, tu mets parfois des parfums masculins !" (parce que mes collègues ne sont pas fan d'un Daim Blond ou d'une Heure Défendue), qui me fait beaucoup sourire à chaque fois.

    Je doute que ce 1932 soit assez masculin pour moi, mais la curiosité est sans doute mon défaut le plus avouable.

    RépondreSupprimer
  17. Le Graphopathe, oui, en effet, ces commentaires de vos collègues sont très drôles quand on connaît l'histoire! Et je suis d'accord, ce Cuir de Russie a une écriture assez différente de la note "cuir de Russie" dans d'autres parfums.

    RépondreSupprimer
  18. Cette collection des Exclusifs, c'est plus qu'une tentation, c'est un rêve -inaccessible dans sa totalité. Une sorte de mirage posé tout là-bas de mon horizon parfums et c'est assez délicieux...
    Je ne possède pour l'instant que Cuir de Russie que j'adore.
    Bois des Îles... oh la c'est une extraordinaire histoire entre lui et moi, quelque chose de secret, intime, une transmission qui traverse le temps, un passage de relai entre êtres aimés... Mais je parle ici d'un très ancien petit coffret contenant une trilogie de fioles. Le Bois desîles nouveau, l'Exclusif je ne le connais pas. Je le désire, oui, le mot n'est pas trop fort mais en même temps je crains un peu de connaître cette nouvelle version, c'est bizarre.
    Enfin celui des Exclusifs pour lequel j'ai tout simplement envie de craquer, c'est Coromandel, juste parce qu'il me paraît être magnifique, somptueux !
    alizarine

    RépondreSupprimer
  19. Alizarine, je vous envie de Bois des Iles ancien (surtout s'il a une histoire). Les parfumeurs qui le connaissent me disent que l'actuel, malheureusement, ne lui ressemble pas tout à fait. Mais il plaît toujours énormément et revient à plusieurs reprises (avec Coromandel, d'ailleurs), dans les commentaires des deux langues.

    RépondreSupprimer
  20. merci pour ce concours je tente ma chance,pour moi c est chanel n5
    nonolala1@hotmail.fr

    RépondreSupprimer
  21. bonjour !
    31 rue Cambon m'intrigue beaucoup et j'aimerai le découvrir !
    merci pour ce jeu et longue continuation !
    mon mail : jero69006@free.fr

    RépondreSupprimer
  22. j'ai offert "1932" à maman en mai 2015 pour son anniversaire car elle est née cette année là.
    joli clin d'oeil, n'est-ce-pas !
    il possède la douceur d'une dame de 83 ans et le chic dont elle est empreinte.
    Il lui va merveilleusement bien...
    agnespier@hotmail.fr

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Excellente idée, en effet ! Je suis heureuse que vous ayez pu lui faire un cadeau aussi bien choisi et bien porté... Pas facile d'offrir un parfum.

      Supprimer